La négociation collective demeure dynamique en entreprise avec près de 77 000 accords signés en 2020 et 950 dans les branches. Y voyez-vous un signe de la vitalité du dialogue social ?
Il faut être prudent dans l’interprétation de ces chiffres, car les ordonnances Macron ont permis de signer n’importe quoi. Dans l’entreprise, elles ont élargi les possibilités de déroger à la loi et aux accords de branche en concluant des textes moins disants – et en délégitimant les acteurs syndicaux au passage. Je pense aux négociations dans des comités sociaux et économiques (CSE) sans étiquette et à la pratique des référendums dans les entreprises de moins de 20 salariés. De peur de perdre leur job, il y a en pareil cas toujours une proportion importante de gens qui lève la main. Cela revient à donner à l’employeur une sorte de droit unilatéral de faire passer ses décisions.
Au contraire, plusieurs indicateurs montrent que le dialogue social se dégrade. Moins de la moitié des CSE se sont constitués par voie d’accord, alors que c’était l’idée initiale. Cela revient à dire que tous les autres ne se sont formés que par obligation légale… Au niveau des branches, être obligé d’aller jusqu’au Conseil d’État pour régler le problème du salaire minimum hiérarchique (SMH) n’est pas un signe de fluidité, quand bien même l’instance a donné raison à la CFE-CGC et aux organisations syndicales. On fait une loi pour améliorer le dialogue social et on a besoin du contentieux pour l’interpréter !
Propos recueillis par Gilles Lockhart