Dans libération, françois hommeril juge le quinquennat macron
Interrogé par le quotidien, le président de la CFE-CGC analyse sans concession le bilan social d’Emmanuel Macron.
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Interrogé par le quotidien, le président de la CFE-CGC analyse sans concession le bilan social d’Emmanuel Macron.
Sous le titre « Le président de la République est allé toujours plus loin dans la dérégulation » (voir ici l’article daté du 7 mars), François Hommeril, président de la CFE-CGC, « premier syndicat des cadres » comme le rappelle le journaliste Frantz Durupt, a livré son analyse.
DÉFENSE DE L’ASSURANCE-CHÔMAGE DES CADRES
« Dans la réforme de l’assurance chômage, la dégressivité des allocations pour les cadres, c’est du populisme assumé, pour dire « on va aussi taper sur les bonnes rémunérations ». Mais en oubliant que pour ces personnes, la réinsertion sur le marché du travail est très difficile, et peut prendre entre un et deux ans. »
EFFETS D’AUBAINE DU CHÔMAGE PARTIEL
« Le chômage partiel, oui, c’était une mesure à prendre. Il fallait un peu de courage et avoir l’esprit clair pour cela. Mais les dispositifs ne sont pas assez sophistiqués et pas suffisamment conditionnés. Quand vous avez planté une fleur dans le gazon, vous avez deux façons de l’arroser : soit vous prenez un jet tournant qui arrose tout autour de lui, soit vous allez au pied de la plante avec l’arrosoir. Le gouvernement a surtout utilisé le grand jet, avec des effets d’aubaine. »
REVOIR LA GOUVERNANCE DES GRANDES ENTREPRISES
« Notre économie est gouvernée par de grandes entreprises qui définissent les règles de l’organisation des différents secteurs à travers la chaîne de sous-traitance, et la gouvernance de ces entreprises est uniquement inspirée par ceux qui représentent les intérêts du capital. Ça ne peut pas fonctionner et ça n’est pas légitime. Le capital est une ressource comme une autre, qui aujourd’hui est plutôt abondante. La logique voudrait que ce soit l’entreprise qui dicte ses exigences au capital, et pas l’inverse. J’aimerais que le gouvernement, quel qu’il soit, arrive à comprendre cette évidence. Si on réforme cela, on change tout, car on remet les acteurs de la production en situation de négocier leur juste part du progrès. »
NON À LA BAISSE DES COTISATIONS SOCIALES
« L’idée que le salaire brut serait trop élevé et le net trop faible (NDLR : donc qu’il y aurait trop de cotisations, argument avancé par des candidats à la présidentielle), c’est « Oui-Oui au pays de la feuille de paye ». Tout ce qu’on a fait sur le sujet, alléger les cotisations depuis tant d’années, n’a que des effets négatifs. Ça ouvre les trappes à bas salaire. C’est un système sans fin, mortifère. Si c’était le salaire qui faisait la compétitivité, le Bangladesh serait la première économie du monde. En Suisse, le smic est à 3 000 francs suisses et il y a des usines. Alors, comment font-ils ? »
PAS DE PROBLÈME FINANCIER AU NIVEAU DES RETRAITES
« Concernant les retraites, je suis contre toute réforme systémique et paramétrique. Ça n’est pas nécessaire, car il n’y a pas de problème financier. Quant à l’argument de l’espérance de vie… J’invite quiconque à taper « espérance de vie » sur Google. Il sort un tableau de l’Insee, et on s’aperçoit qu’elle n’augmente plus depuis 2014. »
MAINTENIR UNE DYNAMIQUE DE PROGRESSION DES SALAIRES
« Sur le smic, il faut être clair : on ne peut pas avoir une vie décente avec. Mais si son augmentation n’est pas suivie d’une hausse homothétique de toutes les grilles de salaire, qu’est-ce qu’il va se passer ? Dans vingt ans, 80 % des gens seront au smic ! Il faut donc maintenir une dynamique pour qu’il y ait toujours un gain de salaire à progresser. Une société dans laquelle les gens n’ont pas envie d’être cadre, c’est une société qui régresse, qui se déclasse. Mais il faudrait déjà que l’État montre l’exemple dans la fonction publique. »